mardi 16 octobre 2018

Comment vérifier que ses publications sont bien publiées dans HAL (à partir de leur DOI)

Préambule

HAL est mis en avant par le CNRS et l'HCéRES pour déposer les listes de publications affiliées à un structure. De même, pour les divers rapports (compte rendu d'activité à vague et demi-vague, CRAC, RIBAC, évaluation ANR, ERC, etc). Les chercheurs sont amenés à très régulièrement faire état de leur liste de publication sur une période donnée.

En partant que l'étape HAL est imposée à un moment ou un autre, autant faire en sorte que le travail soit fait une bonne fois pour toute et donc l'utiliser jusqu'au bout! 

S'il y avait de nombreuses réticences à une époque dues à la lourdeur du processus de dépôt, cela a été amélioré significativement au cours des années. Si cela ne reste pas une partie de plaisir, c'est devenu maintenant raisonnable grâce à un allègement significatif de la saisie manuelle nécessaire.

Comme il y a de nombreux moyen d'avoir une liste personnelle de publications à jour, il est possible de s'en servir pour vérifier si tout est bien fait sur HAL. Je pars du postulat que la majorité des activités de publication correspondent à des articles dans des journaux scientifiques à comité de lecture « sérieux » donc avec un DOI au minimum.

Obtenir sa  liste de DOI pour faire les vérifications

Il faut donc commencer par... avoir une liste de DOI. Je suis parti du principe que chaque chercheur a une liste à jour de ses publications. Seulement, cette liste n'est en général pas directement disponible car stockée sous une autre forme. J'ai donc créé deux scripts :

  • Un premier script à partir d'un fichier texte où j'ai supposé que chaque article était indiqué sous une forme «DOI:XX.XXXX/XXXXXX» avec rien derrière sur la ligne. (j'ai inclus les variations possibles en terme d'espace ou non avant et après les deux point ainsi que le DOI qui peut être une combinaison quelconque de majuscules et minuscules). Cela permet de récupérer tous les DOI avec un DOI par ligne.
  • Un deuxième script qui lui permet d'extraire une liste de DOI à partir d'un fichier .bib.
La majorité des cas permet de se rapporter à une de ces deux situations (Zotero, endnote, mendeley et research gate assurent tous des exports au format bib, csv ou texte.). C'est également possible via un researcherid. Pour Orcid, l'export n'est pas encore trop au point, mais je suppose que quelqu'un va l'implémenter un jour ou l'autre.


Vérifier les dépôts dans HAL à partir de sa liste de DOI



Une fois cette liste obtenue, il suffit de cliquer sur le bouton correspondant pour lancer le script suivant qui permet d'entrer la structure à laquelle on est affilié. Il est bien évidemment possible de sauter l'étape précédente et coller directement la liste de DOI dans le cadre correspondant (depuis un fichier excel par exemple). Pour trouver ce numéro, il faut aller dans AUréHAL, taper le nom de sa structure (son labo), le plus simple est souvent de taper son numéro d'UMR.




Le numéro indiqué sur fond gris est celui qui nous intéresse.

Une fois les DOI et la structure d'affiliation indiqués, c'est parti !

Il y a trois types de résultats :

  1. Les résultats absents de HAL, il va falloir faire l'ajout directement, pour cela, j'ai mis un champ de formulaire, il suffit de cliquer dessus pour que le DOI soit copié dans le presse-papier, il n'y a plus qu'à faire le dépôt sur HAL. L'étape la plus longue est de corriger/trouver les affiliations. Si vous avez créé votre idHal, ça ira un peu plus vite pour vous, de même si vos-co-auteurs ont créé le leur. HAL fait maintenant un peu mieux en essayant de trouver correctement l'affiliation, mais comme c'est assez compliqué, il faut bien faire attention à vérifier ça.

    C'est l'étape la plus longue. Personnellement, je regarde pour les auteurs français et je ne met rien pour les auteurs étrangers qui ont peu de chance de vouloir corriger les dépôts que vous faites dans HAL. Bien évidemment, il est préférable de le faire correctement pour tout le monde, mais quand il y a plusieurs centaines de notices à traiter, il faut faire des compromis...

    Il peut y avoir des cas particuliers où le dépôt ne marche pas très bien : les colloques où il manque généralement la date (à rentrer) et les chapitres de livre qui ont un DOI mais ne sont généralement pas dans CrossRef (donc pour lesquels l'importation de méta-données ne fonctionne pas).
  2. Les résultats dans HAL mais non rattachés à votre labo, il faut alors demander la propriété. Il y a un lien direct sur la référence HAL et il est alors possible de faire la demande directement.
    Si jamais la demande n'aboutit pas, il ne faut pas hésiter à contacter le support qui règle généralement ça en moins d'un journée.
  3. Les publications déposées dans HAL avec au moins un auteur affilié à votre laboratoire (mais pas forcément vous !).

Aller un peu plus loin

Coloration syntaxique et liste d'auteurs affiliés à la structure

Pour mon laboratoire, j'ai créé une liste d'auteurs ayant des publications où au moins un auteur est rattaché au laboratoire. Pour cela, encore un petit script.  C'est un peu long et il faut mieux ne pas trop forcer en mettant l'identifiant d'une grosse structure pour ne pas faire exploser le serveur. La sortie est un peu plus basique et fait une sortie sous forme de deux tableaux javascript : un avec les noms d'auteurs, l'autre avec le nombre de publications correspondant. Le script limite à 3000 noms, ça peut sembler beaucoup, mais avec les thésards, les collaborateurs occasionnels, etc, ça monte vite. J'ai utilisé les données pour les coder en dur car la requête est très gourmande et il est déraisonnable de la faire dynamiquement pour créer le tableau de liste d'auteur à la volée pour chaque requête.

Une fois ces deux tableaux créés, je peux alors m'en servir pour colorer les entrées dans mon script pour mettre en valeur les auteurs qui publient souvent avec l'affiliation du laboratoire. Cela permet de rapidement pouvoir identifier les publications du laboratoire par rapport aux autres publications intruses. En effet, j'ai pu faire des import massifs via Scopus ou Web of Knowledge. Cependant, les recherches sur l'affiliation étant assez difficiles, il y a généralement des publications qui ne viennent pas de mon laboratoire. Pour utiliser les deux tableaux, il faut alors modifier le fichier "includes/HAL.js" en changeant les tableaux « Names » et « numPubli » et changer la valeur de « preferredAffiliation ».

Récupérer des données sur les publications hors HAL

Pour cela, j'utilise l'API de CrossRef qui permet d'avoir les auteurs et sur lesquels je peux faire de la coloration syntaxique.

Utiliser le script pour soi

Pour changer automatiquement l'affiliation il suffit de donner en paramètre dans l'URL l'affiliation : http://perso.ens-lyon.fr/martin.verot/HAL.php?affiliation=776 par exemple pour la structure 776. Idem pour la page permettant de récupérer la liste d'auteurs. Tout est fait en javascript sur les pages, donc il n'est pas forcément nécessaire de faire tourner les différents scripts sur un serveur. L'enregistrer sur son disque et l'ouvrir avec son navigateur suffit.

Vérifier que SON affiliation est la bonne pour chaque DOI

Je suis en train de créer un petit script pour ça...

Conclusion

Tout n'est pas parfait, mais cette petite série d'outils m'a permis de faire environ 200 dépôts et de vérifier plusieurs milliers de notices assez rapidement. N'hésitez pas à commenter l'article ou à m'écrire (mon adresse mail est visible sur cette page) si vous avez des commentaires ou questions.

lundi 18 juin 2018

Des orbitales s, p, d au format vectoriel pour des diagrammes d'orbitales

De la nécessité

S'il n'est pas rare de croiser des diagrammes orbitalaires, leur qualité est beaucoup plus aléatoire. Ainsi, la tendance actuelle est plutôt aux orbitales correspondant à des isosurfaces issues de logiciels dédiés. Cependant, ces orbitales ne permettent pas toujours de comprendre simplement les poids relatifs des différentes orbitales. C'est tout la puissance de la schématisation qui est cruciale ici. Bien que moins rigoureuses, les orbitales schématiques sont souvent plus parlantes et surtout plus faciles à dessiner à la main.


La même orbitale pour NH3 sous orbimol à gauche et en schématique à droite.

Chemdraw propose quelques orbitales mais je ne possède pas le logiciel et il n'y a pas tout (sans parler de l'aspect propriétaire).

La solution



J'ai ainsi eu à tracer de nombreuses diagrammes orbitalaires, pour mon cours sur les complexes en chimie inorganique et pour mon cours de chimie orbitalaire. Sans parler des nombreux devoirs sur tables où des orbitales viennent souvent s'y mêler.

J'ai ainsi mis à disposition mon fichier en format svg (vectoriel) qui permet ainsi de construire tous les diagrammes possibles et imaginables. Je met ce fichier à disposition sous licence CC-NC (pas d'utilisation commerciale). J'avais initialement utilisé des filtres sous Inkscape mais qui étaient rendus sous forme matricielle. Cette version utilise des dégradés et devrait réduire les problèmes de compatibilité. De même, j'ai mis différentes combinaisons de phase afin de mieux pouvoir tracer les orbitales liantes, antiliantes ou non liantes.  J'ai également ajouté des orbitales hybrides toujours pour pouvoir dessiner un maximum de situations. 

Je mettrais peut-être prochainement à disposition des diagrammes d'orbitales plus variés et déjà tous construits.

N'hésitez pas à aller voir ma page de cours où vous pourrez voir des exemples de diagrammes construits à l'aide de ces orbitales.

Sous inkscape

Pour redimensionner aussi les bords des orbitales lorsque vous modifiez les orbitales, il faut cocher le bouton indiqué ci-dessous dans la barre de tâche principale.


De même, pour changer les orientations et phases des lobes, les raccourcis « V » et « H » qui permettent de faire des miroirs sont utiles.

dimanche 5 mars 2017

Règle de Klechkowky, Tableau périodique sous LaTeX

Deux petites choses aujourd'hui :
  1. Un petit schéma de Klechkowsky, très largement tiré de la page de Germain Salvato-Vallverdu 
  2. Un tableau périodique inspiré du travail de Ivan Griffin sur Texamples

Configuration électronique et règle de Klechkowsky

En dehors des nombreux noms et graphies associées : « Aufbau principle », règle de Klechkowsky, Klechkovsky, Madelung, Janet. Il est bien courant d'avoir recours aux configurations électroniques des atomes avec leurs fameuses exceptions. Que ce soit en atomistique, en chimie inorganique ou autre, la configuration électronique est bien souvent le départ pour faire un décompte électronique correct et bien comprendre les tendances qui s'en dégagent.

Ainsi, après avoir cherché sur internet, je suis tombé sur une très bonne version proposée par Germain Salvato-Vallverdu. J'ai juste ajusté quelques petits détails qui ne m'allaient pas :
  • J'ai enlevé la grille qui était à mon goût inutile ;
  • J'ai réduit l'espacement entre les colonnes pour que les diagonales soient plus à 45 ° afin de mieux voir l'aspect « diagonale » ;
  • J'ai ajouté un effet de transparence aux flèches ;
  • Je suis passé avec le package mathpazo qui est ma police usuelle.
Le résultat final est très proche de celui déjà proposé par Germain, il est juste un peu plus épuré (on pourrait même encore supprimer les pointillés).
La règle de Klechkowsky expliquée graphiquement.
Comme d'habitude, le fichier .tex et le .pdf sont également disponibles pour ceux qui le souhaitent. Comme cela, vous pourrez continuer à mettre à votre goût le superbe travail de Germain, sa galerie d'exemples sous Tikz vaut le coup d'œil.

Un tableau périodique actualisé et en français

 Ici, c'est la pierre de rosette de tout physico-chimiste qui se respecte. Voilà un petit tableau périodique très largement inspiré de celui de de Ivan Griffin sur Texamples. Encore une fois, quelques petites modifications :
  • J'ai francisé les noms des éléments ;
  • J'ai mis à jour les noms des derniers éléments (Flérovium au lieu de ununquadium, etc)
  • J'ai enlevé toutes les couleurs pour l'impression.
Un tableau périodique actualisé et facilement imprimable.
Encore une fois, le fichier .tex et le .pdf sont disponibles


Bref, je n'ai rien inventé et c'est réutilisé, mais il est inutile de réinventer la roue. Au passage, si vous voulez, vous pouvez aussi voir du papier millimétré ou semi-logaithmique, un graphique en coordonnées polaires ou mon cours sur LaTeX.

Pour les personnes intéressées par le tableau périodique, je suis également en train de créer un tableau périodique interactif afin de pouvoir visualiser directement la « périodicité ». Des données interactives et dynamiques sont présentées (les pages sont en langue anglaise pour toucher un public plus large). Pour l'instant, les poids atomiques, les énergies d'ionisation et l'affinité électronique sont traités.

samedi 25 février 2017

Évaluation par compétence dans le supérieur, une première approche.

C'est dans l'air du temps et avec les nouveaux programmes, c'est devenu imposé par le ministère : l'évaluation par compétence est maintenant devenu la norme. Du coup, je m'y suis essayé pour un sujet d'agrégation blanche. Le sujet fait 100 questions, traite plusieurs sujets et est suffisamment vaste et long pour faire appel à un panel complet de compétences.


Pour l'instant, j'ai tout fait sous Excel (enfin, Calc sous Open Office), mais clairement, ça mériterait d'être amélioré avec un vrai système automatisé et quelques améliorations en terme d'ergonomie. J'ai quelques idées pour automatiser, mais clairement, il y a des complications à prendre en compte si on passe en applicatif.

Plus que la partie compétence en elle même, c'est plutôt ce que ça implique qui m'a séduit. La fiche finale anonymisée est disponible.


Les compétences

Je n'ai pas cherché à faire original et l'intérêt est plutôt à la normalisation. Cependant, la catégorisation a vite montré ses limites avec des questions étant un peu tangentes. J'ai donc gardé les compétences suivantes :

  • APP : s'approprier, souvent cela veut dire qu'il fallait analyser un document fourni et le comprendre ;
  • RÉA : réaliser, en général, faire un calcul ou une application numérique ;
  • ANA : analyser, formuler une hypothèse, interpréter un document ;
  •  VAL : valider, confirmer une hypothèse, valider un résultat par l'expérience ;
  •  COM : communiquer, faire une petite synthèse, proposer un argument ;
  •  RC : restitution de connaissance, une connaissance pure (de cours le plus souvent, de la culture générale parfois) ; 


La compétence « réaliser » est tout de même largement prépondérante : à elle seule, cette compétence représentait 70 points pour une vingtaine pour les autres compétences. En même temps, pour un sujet de ce type, ça ne me semble pas extra-ordinaire.

Les items

Pour moi, c'est ce qui a rendu la correction plus juste entre les candidats : le fait de lister les items de correction. Cela permet de baliser des points obligatoires qui seront évalué de manière la plus impartiale possible. Clairement, j'ai encore des progrès à faire pour avoir une description plus précise des items afin d'être encore plus rigoureux. Pour le décompte des points, en cas d'erreur numérique, j'ai compté la moitié des points pour les propagations d'erreur du moment que tout était cohérent. Après, j'ai pris le parti d'accorder très régulièrement 20 % des points pour les personnes ayant tenté de répondre à la question même si la réponse présentait beaucoup d'erreur.

L'établissement du barème


J'ai attribué un nombre de point global à la question (un entier entre 1 et 6), ensuite, chaque item de correction a un coefficient (par exemple, pour la configuration du soufre : la question était sur 1 point,  90% des points de la question portaient sur la configuration et 10 % sur la mention de Klechkowsky par exemple). L'informatisation permet de laisser le calcul se faire de manière automatique sans avoir à gérer des pouièmes de points. De même, bien que le barème ait très peu changé lors de la correction, j'ai fait quelques ajustements en cours de route de manière à refléter au mieux les difficultés de chaque question. Heureusement, je n'ai pas eu trop à ajouter d'éléments de correction au fur et à mesure.

Aspect visuel


J'ai découvert une fonction bien utile de coloration automatique pour que la réussite à chaque question soit visuelle. Pour cela, sous Open Office : Format » Formattage conditionnel » Échelle de couleur. J'ai juste changé en pourcent au lieu de pourcentile. Cela permet d'avoir du vert pour les questions réussies et du rouge pour les questions ratées.


Indications sur la difficulté de la question

Pour cela, j'ai fait deux choses : déjà, le calcul d'un taux moyen de réussite qui permet de donner un indice de difficulté moyen. Cela permet de voir les successions de questions très peu réussies.

Réussite moyenne pour voir si la question est intrinsèquement difficile ou non. On peut voir ici qu'après un passage facile, les choses se sont rapidement corsées.

Après, j'ai découpé les étudiants en quatre catégorie de niveau en me basant sur les notes. Cela permet de voir à quel point la question était discriminante.
Ici, on voit que les meilleurs ont été capables d'aller plus loin dans l'exercice alors que les plus faibles se sont arrêtés très rapidement.
Ici, on peut voir que seuls les deux derniers groupes ont été en réelle difficulté, qu'ils ont pu reprendre l'exercice rapidement et  que certaines parties étaient globalement difficiles pour tout le monde quel que soit le niveau.
Ainsi, j'ai pu voir que la réussite a été très étalée et que globalement le sujet a été sélectif tout en permettant à tout le monde de réussir quelques questions tout en ayant des questions très peu réussies.
Taux de réussite aux questions par ordre croissant.

Ce qu'il manque

Je n'ai pas fait de discrimination entre les échecs purs (personnes ayant mal répondu) et les personnes n'ayant simplement pas tenté de répondre à la question. Ce qui aurait pu permettre de calculer un taux de réussite global et un taux de réussite pour ceux ayant tenté de répondre.

De plus, en terme esthétique, le tout est globalement plutôt laid avec une mise en page peu évoluée. Il a fallu également gérer les exports PDF à la main pour pouvoir transmettre à mes étudiants leur résultat sous forme individuelle en masquant sélectivement des colonnes plus un envoi manuel de mail à faire. C'est sûrement automatisable, mais je ne sais pas le faire. Idem, il serait intéressant de voir en faisant des graphiques par compétence pour voir si chaque type de compétence suit les mêmes tendances. Idem, faire un peu de clustering ainsi qu'un découpage par partie pourrait encore affiner l'analyse.

Conclusion

Il n'y a certes rien de révolutionnaire et la plupart des résultats auraient été visibles sans ces outils. Cependant, j'ai eu l'impression de pouvoir plus me concentrer sur la correction pure des copies plutôt que les détails annexes (décompte des points, attribution de points en fonction des éléments de réponse). De plus, j'ai pu ainsi avoir une lecture plus fine de mes résultats. Vu que ma promotion est assez petite, une approche statistique n'est pas forcément la plus pertinente, mais pour une promotion plus grande, cela aurait encore renforcé l'intérêt.




samedi 18 juin 2016

Faut-il avoir fait l'ENS pour passer l'agrégation ?

Après avoir écrit un article sur ce qui peut se passer après l'agrégation, voici quelques informations sur les gens qui peuvent rentrer dans une préparation à l'agrégation afin de préparer l'agrégation externe. En effet, la réussite du concours est fortement conditionné par le fait d'avoir pu se préparer au sein d'un centre, en particulier pour les oraux qui sont déterminants.

 Comme toujours, cet article est partiel et reflète mon vécu à l'ENS de Lyon pour la préparation à l'agrégation externe de chimie.



Avoir fait ses études dans une ENS

Oui, forcément, c'est un énorme avantage d'avoir fait l'ENS. En effet, comme l'agrégation fait parti des débouchés spécifiques de ces écoles, les étudiants sont formés dès la L3 sur des sujets importants pour l'agrégation. Comme les notions sont déjà abordées pendant le L3 et l'année de M1, cela permet d'étaler un peu la rudesse de l'année de la préparation. Plus on est préparé ... plus c'est facile. Cependant, si le taux de réussite est beaucoup plus élevé, il n'est pas forcément de 100 % non plus. La réussite à l'agrégation étant tout de même très corrélée aux efforts fournis et à la réussite à l'oral, la composante personnelle reste déterminante. L'ENS est un facteur qui favorise la réussite, mais ça ne fait pas tout le concours est personnel avant tout.

Comme nous avons la possibilité d'accueillir des étudiants par différents canaux (concours depuis les classes prépa, depuis l'université et dossier), il ne faut pas hésiter à vouloir candidater dans les ENS dès la L3 ou le M1, ce sera un bon moyen de booster vos chances de réussite. D'autant plus que même pour les personnes venant des universités, la réussite à l'ENS est tout à fait possible (le début du L3 est souvent difficile, mais nous avons de nombreux exemples d'étudiants issus de l'université qui finissent devant des personnes issues des classes préparatoires, normaliens compris).

Venir d'une école d'ingénieur

À l'ENS de Lyon, nous avons régulièrement des ingénieurs qui arrivent (en particulier depuis chimie Montpellier - ENSCM) et ils ont également un taux de réussite très élevé : en effet, ils ont souvent fait une classe préparatoire et on donc une forte maîtrise de la physique, ce qui est un plus important. De plus, le bachotage et les études sont suffisamment frais pour que retourner dans une atmosphère très studieuse ne leur pose pas trop de problèmes. Et bien évidemment, il y a également des connaissances acquises en école d'ingénieur qui apportent un plus (en chimie organique pour les étudiants de l'ENSCM).

Être passé par une préparation au CAPES (M1 MEEF)

Si vous avez été reçu au CAPES, il faut savoir que vous avez le droit à une année de report pour préparer l'agrégation. Pour en bénéficier, il faut cependant absolument demander l'option « Report de stage » en premier choix lors de votre demande de vœux. Cela implique que si vous loupez l'agrégation après votre année de report, soit vous devez aller enseigner en tant que titulaire du CAPES, soit vous devez démissionner de votre CAPES pour reprendre une deuxième année de préparation à l'agrégation.

Le CAPES reste une antichambre pour la préparation à l'agrégation. Même si les modalités d'évaluation ont changé ces dernières années, la préparation au concours demande plusieurs qualités importantes pour la préparation à l'agrégation :
  • Des connaissances en chimie et en physique : elles sont moins poussées que pour l'agrégation mais forment le socle de ce qui est exigé à l'agrégation. Une bonne maîtrise des notions exigées pour l'agrégation est indispensable pour pouvoir réussir à l'agrégation.
  • Une maîtrise en physique ET en chimie : à l'agrégation, c'est un triptyque : chimie générale, chimie organique et physique. La physique compte environ pour un tiers de la réussite et il est donc important de maîtriser les connaissances associées. Je recommande d'ailleurs souvent de préparer la physique avec les écrits du CAPES dans leur ancienne version (pré 2013). En effet, les écrits en physique ne sont pas si différents que ça de ceux de l'agrégation.
  • Une maîtrise de l'oral : l'admission se juge après des épreuves orales et compte plus que les écrits. Il faut donc absolument être à l'aise à l'oral. Pour cela, la préparation au CAPES est également très importante car elle permet de se familiariser avec l'exercice qui peut être difficile pour certains.
  • La pédagogie, les préparations à l'agrégation ne donnent pas forcément de cours spécifiques sur ce sujet (même s'ils arrivent dans notre nouvelle mouture de Master). Une préparation au CAPES permet donc d'avoir des notions sur le sujet, ce qui ne peut pas nuire pour un concours d'enseignement.

 Après une thèse, des ATER, un post-doc, des vacations

Il y a une forte augmentation de ce type de candidats ces dernières années. Ce type de candidatures a toujours existé, mais avec la concurrence qui devient exponentielle au CNRS et pour les post de maître de conférences, l'agrégation est une voie de reconversion de plus en plus envisagée. Nous accueillons également des doctorants qui se rendent compte que la recherche n'est pas faite pour eux ou qui ont goûté avec plaisir aux enseignements avec un monitorat. Bref, ce sont généralement des personnes qui viennent avec un vrai objectif et donc une motivation de fer. Hors ce critère tout aussi important que la maîtrise scientifique car l'année de la préparation est difficile et la motivation est déterminante pour aller jusqu'au bout.

De plus, la thèse est autant un avantage qu'un inconvénient : les méthodes de travail, présentation orales font partie des compétences fortement développées. Cela permet d'apporter forcément une expertise sur un domaine de la chimie. Avec un peu de chance, si l'oral tombe sur le bon sujet, cela peut être le jackpot. Cependant, cette expertise à son double tranchant : l'agrégation demande au contraire d'être bon partout et donc plutôt généraliste. Il faut donc réapprendre des domaines qui peuvent avoir été abandonnés depuis plusieurs années (en particulier la physique).

Retourner à une ambiance très scolaire comme la préparation à l'agrégation peut également être difficile après des années de thèses où il y a beaucoup plus de liberté. D'autant plus que les écarts d'âges peuvent commencer à se faire sentir : entre des étudiants fraîchement issus de l'ENS et des gens qui ont une thèse voire plus, la vision des choses est différente. Cette différence de maturité se retrouve en physique-chimie : la thèse est également l'occasion d'acquérir du recul qui est une qualité essentielle et très difficile à inculquer. Hors justement, en thèse, les nombreux séminaires et colloques permettent de voir des aspects variés de la chimie.

Un parcours universitaire

Bien que sous-représentée, cette catégorie est tout à fait capable de réussir. Par contre, les gens ayant un cursus avec de la physique et de la chimie sont encore une fois favorisés. C'est la préparation de Strasbourg qui est le meilleur exemple de ce type de profil. En effet, tous les ans, il y a des personnes qui réussissent le concours et qui viennent de Strasbourg avec un parcours le plus souvent uniquement universitaire. Pas d'auto-censure : toute formation en physique-chimie peut vous permettre de candidater dans une préparation et réussir au concours. Et les étudiants issus de la faculté ont des capacités d'autonomie et de travail qui sont généralement très développées. En général, ils ont aussi une bonne connaissance des livres en physique chimie, ce qui est très important pour préparer les oraux.

En reconversion depuis le privé

Là aussi, nous avons eu plusieurs exemples de personnes qui souhaitent quitter leur emploi et qui entament une reconversion  professionnelle. Tout comme les personnes ayant une thèse, les exemples que nous avons eu avaient une motivation de fer. Nous avons ainsi eu des exemples qui ont brillamment réussi (dans le top 5).

Cependant, comme pour les personnes ayant eu une thèse, les connaissances en physique et en chimie ont généralement décliné. Il faut donc nécessairement commencer à réactiver les connaissances avant l'année de la préparation. Et là encore, ces personnes ont un recul de par leur expérience et leur âge qui leur sera très profitable pour préparer le concours.

Conclusion

Pour répondre au titre de l'article : NON, il n'est absolument pas indispensable d'avoir fait ses études à l'ENS pour pouvoir réussir à l'agrégation ou être pris dans une préparation.

Après un bref panorama des personnes que nous accueillons dans notre préparation, il faut être conscient que toutes les études en physique-chimie permettent de pouvoir préparer l'agrégation au sein d'un centre. Chaque voie à ses avantages et ses inconvénients. Ce qui est avant tout déterminant est d'arriver avec une forte motivation et des connaissances solides en physique, chimie générale et chimie organique. Il est possible de combler des lacunes dans un de ces trois domaines, mais à partir de deux domaines où vous êtes en difficulté, ça devient beaucoup plus difficile. En tout cas, il ne faut pas se censurer pour candidater dans les centres de préparation. Chaque année, les différents centres ont des places qui sont non pourvues. Si vous vous posez des questions sur les débouchés de l'agrégation ou l'intérêt de passer l'agrégation plutôt que le Capes, vous pouvez aller consulter les articles correspondants.




mercredi 8 juin 2016

Les débouchés après l'agrégation, un panorama des différentes options

L'agrégation est auréolée de prestige et est censée être une voie royale pour enseigner. Cependant, la réalité des débouchés est significativement différente de l'aura que porte le concours. Ma vision est forcément partielle, subjective et reflète ce qui se passe en physique-chimie option chimie. Il ne faut donc surtout pas prendre au pied de la lettre ce qui est dit pour d'autres domaines. Il y a par exemple des différences très nettes entre ce qui se passe en sciences dures et en sciences humaines !
Un petit schéma des possibilités les plus courantes.

L'enseignement en classes préparatoires

Mythe le plus souvent répandu : l'agrégation mène les gens en classes préparatoires. Il faut bien voir que la réalité est maintenant très éloignée de ce schéma pourtant durement gravé dans la conscience collective. NON, ce n'est pas le débouché majoritaire de l'agrégation.

La chimie n'est pas une matière intervenant dans beaucoup de classes   préparatoires : BCPST et PCSI/PC uniquement, il y a donc peu de besoins. 

Après avoir cherché à ouvrir des classes prépas partout, le ministère de l'éducation nationale a fermé beaucoup de ces petites structures. Cela a entraîné deux effets : les enseignants déjà en poste ont dû être réaffectés ailleurs (ce qui réduit donc le nombre de places pour les nouveaux arrivants) et le pool d'enseignants est encore plus petit. Le gâteau à se partager est donc plus petit et moins ouvert qu'à une autre époque.

Moralité, le nombre de places ouvertes pour les nouveaux entrant en classes préparatoire est très faible, on parle de quelques postes par an ... et encore. De plus, il faut avoir un très (très) bon classement pour pouvoir y prétendre dès l'obtention du concours (les dernières années, top 5 minimum).

Ce n'est pas parce qu'on ne vous a pas proposé un poste dès l'obtention du concours que c'est pour autant perdu. Il faut alors candidater au mouvement spécifique qui est une zone échappant au système de points faisant loi dans l'éducation nationale. En général, il ne faut pas être trop exigeant sur la localisation du poste pour augmenter ses chances d'être appelé - demander Henri IV ou Louis le Grand risque de ne pas trop faire rire les inspecteurs.

Si votre dossier intéresse les inspecteurs (une thèse est un plus, être très actif dans votre domaine aussi - olympiades de chimie, formations, remplacements, projets pédagogiques, formations), ils peuvent alors vous appeler pour vous proposer un poste ... dans toute la France. Et en général le délai pour votre réponse est très court. Il faut donc être prêt à faire valises et bagages sur un "coup de tête". Et en cas d'attaches familiales, il faut mieux que votre conjoint soit également mobile. Bref, ce n'est clairement pas simple.

L'enseignement dans le secondaire

Cette fois-ci, il s'agit du réel débouché majoritaire de l'agrégation. Le concours vous donne une bonification qui dépend des académies mais qui en général vous favorise par rapport aux titulaires du CAPES pour l'obtention de postes en lycée. Cependant, cette bonification dépend des académies et peut être plus ou moins importante. À situation égale, il peut y avoir de grosses disparités académiques.

L'académie d'affectation


Après l'obtention du concours, il y a généralement une année de stage lors de laquelle vous êtes affecté dans une académie et qui correspond en général (mais pas toujours !) à celle que vous avez demandé. Par contre, une fois que vous êtes titulaire, vous passez dans le système de point et vous devez demander une affectation (mouvement inter-académique). Académie qui vous est attribuée selon le nombre de points que vous avez. Ce nombre de points dépend essentiellement de la situation familiale et personnelle en début de carrière. Ainsi, il faut mieux être PACSé ou marié (avec des enfants) pour bénéficier de points et avoir plus de choix. En effet, sans cela, il est difficile d'échapper aux académies de la région île de France, et encore, ça ne suffit pas toujours.  Les barres sont (très) fluctuantes d'année en année et dépendent des matières. En physique chimie, après les académies parisiennes, il y a généralement Amiens qui n'est pas trop haute. Par contre, Toulouse, la Réunion, la Corse, Strasbourg, sont généralement des académies difficiles à avoir.

Une fois affecté dans une académie, il y a une deuxième phase pour déterminer votre poste dans l'académie (mouvement intra-académique). Et là, les points dépendent de chaque académie. C'est à ce stade qu'il peut y avoir des disparités. Il est donc intéressant de connaître le système de point associé à chaque académie. En général, ce sont les syndicats qui sont le mieux à même de vous renseigner ou vous conseiller sur la stratégie à adopter en fonction de vos souhaits.

De manière très générale, les agrégés en région parisienne ont plus facilement des postes en lycée que dans les académies de province. De plus, malgré leur mauvaise réputation, il existe de très nombreux excellents lycées dans ces académies et les équipes enseignantes sont jeunes et dynamiques. Sur le plan professionnel, il peut donc être plus intéressant d'être en région parisienne qu'en province. Après, les problèmes de coût de la vie et de conditions de vie rentrent en compte et pour le coup, la région parisienne peut être plus ou moins attractive en fonction des désirs de chacun.

Le type de postes que l'on peut avoir

Il y a trois grandes possibilités :
  • un poste fixe dans un lycée, encore une fois, en fonction des académies, c'est plus ou moins « facile » à avoir et les agrégés ont des bonifications pour les postes en lycée (qui ne suffisent pas toujours);
  • un poste fixe en collège : non, l'agrégation ne vous empêche pas de vous retrouver au collège, c'est même de plus en plus fréquent, il y a en général des bonifications liées à l'agrégation mais ça ne suffit pas toujours ;
  • un poste de TZR (Titulaire sur Zone de Remplacement) : vous êtes alors affecté sur .. une zone. Zone qui peut être plus ou moins grande et plus ou moins éloignée de vos zones d'intérêt géographique dans l'académie. Dans le meilleur des cas, vous serez affecté à l'année (avec le manque de professeurs, c'est de plus en plus le cas). Par contre, vous pouvez être nommé sur 1, 2, voire 3 établissements. Il faut donc prévoir d'avoir une bonne voiture car le compteur peut pas mal tourner. De plus, il est possible d'avoir un mix avec uniquement des lycées, avec des collèges et des lycées, ou uniquement des collèges. Au delà de ces postes à l'année, vous pouvez aussi être remplaçant ponctuellement (qui est la vision la plus répandue du poste de TZR mais qui ne correspond pas forcément à la majorité des TZR). C'est parfois plus démoralisant lorsqu'il n'y a aucun remplacement à faire, mais vous pouvez aussi vous retrouver d'un coup avec un super remplacement sur un poste de rêve, bref, encore une fois, il n'y a pas de règle absolue.
    Mais quoi qu'il en soit, il est plus difficile de s'impliquer dans un établissement en tant que TZR car par nature, vous pouvez changer d'établissement chaque année, même s'il est aussi courant de rester plusieurs années dans le même établissement.

    En effet, les TZR sont souvent utilisés pour intervenir dans des établissements où il n'y a pas de quoi faire un service complet (c'est ce qu'on appelle les BMP ou Bloc de Moyens Provisoire). Leur service est donc fractionné sur plusieurs établissements qui ont tous besoins de quelques heures mais pas d'un professeur à temps complet. C'est courant pour les TZR, mais cela peut aussi être utilisé pour des personnes ayant un poste fixe.

Continuer en thèse

C'est un motif de report possible mais il faut avoir un monitorat pour valider votre agrégation. Et les trois ans de thèse ne compteront que pour deux pour votre ancienneté. Après la thèse par contre, le ministère ne vous autorisera pas automatiquement vos reports pour continuer en post-doc et autre. Pour l'instant, une ou deux années de report après la thèse sont encore possibles, mais rien ne garantit que le ministère continue à l'autoriser dans les prochaines années. Pour rappel, l'agrégation est un concours de recrutement, ce qui explique que le ministère puisse exiger que vous alliez enseigner.


Enseigner dans le supérieur, post-bac

Devenir maître de conférence/chercheur

Attention, ici, c'est très différent en sciences dures et en sciences humaines.
L'agrégation ne sera qu'une ligne en plus dans votre CV, mais clairement, pour l'instant, les comités de sélections prendront bien davantage en compte votre bibliométrie que l'agrégation. Donc passer l'agrégation ne sera pas forcément un plus en tant que tel (même si vous pourrez la valoriser lors de travaux de recherche et donc publier plus).
En sciences humaines, c'est très différent, de manière officieuse voire officielle il y est préférable d'avoir l'agrégation pour un poste dans le supérieur.
De plus, le concours de l'agrégation est un concours de recrutement, donc s'il peut y avoir quelques reports, le ministère est en droit, chaque année, de vous demander de finir en poste ou de démissionner. 

Devenir PRAG

Cette fois, il faut être agrégé pour y prétendre, donc forcément, c'est un débouché spécifique pour les agrégés. Le type de postes est très varié donc il est très difficile de faire des généralités. Cependant quelques profils récurrents :
- Pour les Master MEEF (préparation au CAPES) dans les Espé (École Supérieure du Professorat et de l'Éducation, ex-IUFM)
- En chimie générale pour l'accompagnement dans les années de licence
- En génie chimique (même si l'agrégation ne forme pas franchement de spécialistes dans le domaine)
Pour les chimistes organiciens : les postes clairement orientés dans ce domaine sont beaucoup plus rares. Pour certains postes, une expérience dans le secondaire est demandée. De même comme les postes sont à l'université, même si ce n'est pas obligatoire, avoir une thèse est à priori un plus.

Les postes sont publiés sur le site Galaxie et il est possible de s'inscrire à la newsletter pour être au courant de tous les postes qui paraissent (leur publication sur galaxie est obligatoire). Ici, le recrutement se fait face à une commission, donc vous êtes jugé sur vos mérites. De plus, les postes sont dans des universités, les opportunités sont donc dans des villes de taille relativement importante (même si les universités peuvent avoir des antennes sur des sites plus petits). En terme de recrutement, il n'est pas rare que les universités aient déjà un candidat en interne, donc il faut absolument prendre contact avec les personnes pour vous faire connaître avant l'audition et discuter avec le département qui recrute.  Le nombre de poste par an est tout de même réduit : entre 5 et une petite dizaine. L'avancement est par contre à priori plus lent qu'au lycée car il n'y a pas d'inspections : seul le directeur de département vous note et en général, l'avancement se fait plutôt à l'ancienneté. De plus, les enseignements comprennent le plus souvent majoritairement des TP et des TD, avoir des cours peut être plus difficile.

Être agrégé préparateur/ATER

Ce sont des postes temporaires. En tant qu'ATER, vous ne serez pas payé sur la grille des agrégés, les contrats durent un an et leur nombre est limité. La possibilité de faire de la recherche est souvent limitée car les enseignements prennent généralement beaucoup de temps. (Comme pour les postes de PRAG, le recrutement se passe aussi sur le site Galaxie.)

Il y a aussi des postes d'agrégé préparateur qui n'existent à ma connaissance que dans les ENS et donc en nombre limité. Du coup, les enseignements sont très attractifs et là vous serez payé sur la grille de salaire des agrégés. Par contre, leur durée est de trois ans renouvelable deux fois. (Comme pour les postes de PRAG, le recrutement se passe aussi sur le site Galaxie.)

Dans les IUT, en BTS, sections internationales

Pour ces postes, soit il faut candidater au mouvement spécifique et donc passer par la plateforme idoine (SIAM). Dans ce cas, il faut fournir une lettre de motivation, un CV détaillé. Comme pour les postes en prépa, l'avis des IG et IPR est déterminant. Donc encore une fois, montrer votre investissement/faire des piges dans les établissements concernés est un gros plus.

Conclusion

Si les débouchés sont variés, il faut être conscient qu'actuellement, la majorité des titulaires de l'agrégation finit au lycée. Les autres débouchés sont nombreux, mais concernent tous des effectifs très restreints. En tout cas, j'espère que cela permettra de clarifier un peu les différents types de postes accessibles avec avantages et inconvénients. Si vous avez des réactions ou des expériences à partager pour compléter l'article, n'hésitez pas à laisser un commentaire ou me contacter par mail.

Depuis la rédaction de cet article, le ministère a eu les résultats d'un commission sur La place des agrégés dans l'enseignement universitaire. La lecture de ce rapport permet de donner un point de vue plus général qui souligne les particularités, points positifs et négatifs de l'enseignement dans le supérieur.

De même, si vous vous posez la question de passer l'agrégation ou le CAPES, vous pouvez aller lire mon article intitulé "Passer l'agrégation plutôt que le CAPES, encore une question d'actualité ?". Et si vous souhaitez passer le cap et candidater dans une préparation, vous pouvez lire mon article "Faut-il avoir fait l'ENS pour passer l'agrégation ?".

samedi 14 mai 2016

Un tracé pour TP de directivité du son en terminale spécialité


Pour un TP sur la directivité du son, j'ai eu à créer un petit graphique à compléter. (les exemples sont issus du site 3D3A )

En effet, le principe est de faire tracer à des élèves la réponse d'un haut parleur en coordonnées polaires. J'ai fait un exemplaire à 180 ° et l'autre à 360 °.



Les fichiers .tex sont disponibles pour celui à 180 et celui à 360. Les pdf sont aussi disponibles pour celui à 180 et celui à 360. En effet, les tracés existants n'étaient pas très lisibles et faire à la main ce genre de graphique aurait été ... fastidieux. Il a fallu ruser avec le package calculator pour différencier les angles affichés et le système d'angle polaire de tikz. Comme je n'avais pas fait de tikz depuis longtemps, tikz pour l'impatient m'a permis comme toujours de rapidement retrouver les commandes nécessaires.

Pour tracer votre propre papier millimétré ou du papier semi-logarithmique, vous pouvez aussi aller voir l'article que j'ai rédigé à ce sujet.

dimanche 7 juin 2015

Le numéro CAS, un identifiant dépassé ?

Pour identifier un produit chimique, il existe de nombreux identifiants :

Parmi cette forêt d'identifiants, les chimistes raisonnent généralement en terme de numéro CAS. En effet, il est généralement mentionné sur les pots des produits et relativement facilement accessible (via le site emolecules par exemple). Et comme le numéro CAS est porté par l'ACS, il y a une certaine 'crédibilité' associée à cet identifiant ainsi qu'un gros lobbying indirect.

Pourtant, le numéro CAS est aussi bourré de défauts, et non des moindre.

Un identifiant pas si unique

La base de donnée des numéros CAS est protégée, et il faut donc payer pour y avoir accès de manière fiable. Ainsi, cet identifiant qui est pourtant censé être unique peut finir par ... ne plus vraiment l'être.

En effet, comme la base de donnée est propriétaire, la plupart des gens vont voir chez les autres un numéro CAS, puis le recopient sans avoir aucun moyen de le vérifier eux-même, et les lecteurs ne peuvent à priori pas non plus le vérifier.

L'article cité plus haut présente ainsi un composé très exotique : l'aspirine pour laquelle on peut trouver jusqu'à 6 numéro CAS différents en fonction de l'endroit où l'on cherche. Du coup, l'identifiant unique n'est .. plus si unique. En effet, le numéro CAS peut par exemple prendre en compte le polymorphisme : différentes phases du même composé ont un numéro CAS différent. Ce n'est pas forcément un problème en soi, effectivement, les propriétés peuvent fortement différer en fonction de la phase cristalline, mais quelqu'un qui cherche de l'aspirine ne cherche pas forcément une phase particulière. Or en entrant un numéro CAS, on peut finir avec une phase spécifique même si c'est pour utiliser le composé en phase liquide. Un peu dommage...

Pour des composés pas si uniques

De même, des isomères différents peuvent avoir différents numéro CAS, du coup, en faisant une recherche par numéro CAS, on peut finir soit avec un mélange racémique, un isomère ou un autre mélange d'isomères que celui souhaité. Or le plus souvent, les chimistes recherchent avant tout un composé avec une structure donnée. Un chimiste non averti qui a une confiance aveugle en le numéro CAS, il pourra finir avec un mélange racémique s'il n'a pas fait suffisamment attention à la désignation du produit.

Un format propriétaire et fermé

Dans tous les cas où il y a doute, aucune manière de vérifier car il n'y a que les personnes qui ont payé (cher, voire très cher) l'accès à la base de donnée du CAS qui peuvent vérifier. Ainsi, l'uniformité des données et numéros CAS n'est absolument pas garantie. L'article cité plus haut ainsi que Glushko dans le livre The Discipline of Organizing résument très bien ce problème.


En effet : l'utilisateur fait confiance au numéro CAS fourni par l'autorité Y (gratuite) sans avoir accès à l'autorité X(payante) qui est pourtant la seule à avoir autorité. Moralité, il n'est pas possible de vérifier si le numéro CAS fourni est réellement le bon car le lien entre l'autorité X et Y n'est pas forcément établi. Ce mode de fonctionnement favorise énormément la propagation d'erreur.

Ainsi, l'aspect propriétaire fermé empêche toute vérification pour l'utilisateur quelconque. C'est donc un frein notable à l'adoption du numéro CAS en tant que réel standard faisant autorité pour la désignation de substances chimiques.

Impossible à informatiser

En plus des problèmes sus-cités, comme le format est à accès payant, il n'est pas possible de librement consulter la base de donnée via une quelconque API. Du coup, encore une fois, il est impossible de propager le numéro CAS en tant que standard puisque l'ACS -- dans son immense bonté -- ne donne accès qu'à à peine 10000 composés via la base commonchemistry. Pendant ce temps là, Pubchem donne accès à environ 200 000 000 composés (oui, 200 millions, soit environ 10⁴ fois plus, une paille quoi). Et en plus de cela, Pubchem le fait via une API documentée là où l'ACS ne laisse accès que via une interface web. De plus, Pubchem propose différents autres descripteurs que le CID comme l'InChi, SMILES, etc.

Conclusion

Aujourd'hui, l'inter-opérabilité est une clé, le boom de LibreOffice, GoogleDoc et le déclin de la suite Office de Microsoft en sont un preuve, tout comme le déclin de Microsoft en tant qu'OS sur les appareil nomades, etc. L'IUPAC avec l'InChi et l'InChiKey proposent maintenant des alternatives concrètes pour créer des identifiants basés sur la structure du composé de manière unique, reproductible, gratuite, standardisé et ce en toute transparence. À mon avis, si l'ACS ne fait pas un effort, le CAS va lentement péricliter face aux nouveaux standards qui permettent une informatisation bien plus simple. Bien que le numéro CAS soit encore très largement utilisé, il est de plus en plus courant d'avoir à informatiser des données, or pour l'instant, il n'est pas simple de travailler à grande échelle de manière sure en se basant sur le numéro CAS. En effet, la communication entre les bases de données de produits chimiques est maintenant essentielle pour pouvoir communiquer efficacement sur la toxicité et les propriétés physiques des différents composés chimique, savoir quels sont les stocks, etc.

Alors, l'ACS, chiche de faire le pari de l'ouverture ?

samedi 1 décembre 2012

Passer l'agrégation plutôt que le CAPES, encore une question d'actualité ?

En ces périodes de réforme éducative et de problèmes d'effectifs, la position du concours de l'agrégation face au CAPES se pose. Étant titulaire de l'agrégation de chimie, je vais plus parler de cette agrégation en particulier.

L'agrégation : un concours dépassé ?

L'institution de l'agrégation est plutôt âgée, en effet le concours est plus que séculaire. Si l'aura du concours attire toujours des étudiants pour passer ce concours prestigieux, la différence entre la réalité du métier est la façon dont il est perçu est significative.

Le nombre de places a fortement diminué : une trentaine de places à l'agrégation de chimie. Du coup, seuls les étudiants de quelques préparations très spécialisées et de bon niveau se partagent le gâteau (80 à 90% minimum des étudiants proviennent du trio ENS Lyon/ENS Cachan/université de Strasbourg).  Les miettes restantes sont laissées aux personnes préparant le concours à l'ENS Ulm, l'université de Lille, Toulouse et quelques autres rares exceptions. Par conséquent, statistiquement, le lieu ou vous préparez le concours conditionne très fortement votre chance de réussite. Bien sûr, il y a toujours des gens n'étant pas passés par ces établissements qui réussissent, mais ce ne sont que des exceptions qui confirment la règle. Le concours devient ainsi très fortement endogène avec des profils stéréotypés avec des gens qui ont le plus souvent fait le parcours classe prépa, normalien/auditeur, agrégé (j'en fais partie). Les ENS ouvrent leur portes pour les années de préparation à l'agrégation, ce qui permet tout de même une ouverture aux ingénieurs ou aux personnes issues des universités.

De plus, le très faible nombre de candidats augmente le facteur chance aux oraux. Bien évidemment, la sélection effectuée par le jury est objective et juste en fonction de ce qui lui est présenté, mais le fait de tomber sur une leçon que vous aimé ou que vous avez bien préparé peut directement apporter quelques points qui font toute la différence entre le fait d'être admis ou recalé. 

Aller au delà des idées reçues sur le mouvement spécifique

Une fois le diplôme obtenu, un agrégé est-il destiné à enseigner en prépa ? En chimie, la réponse est NON. Contrairement aux légendes universitaires, les agrégés n'ont pas une place réservée en prépa, bien au contraire. Après avoir ouvert des prépas un peu partout en France, l'État est en train de fermer de nombreuses prépas considérées comme trop petites. Ainsi, à la sortie du concours, seulement quelques (rares) postes sont proposés à quelques personnes triées sur le volet dans le top 5 du concours. Pour ceux qui ont décidé de faire une thèse après avoir réussi le concours, c'est à peu près la même chose : il y a seulement quelques postes proposés.


En BTS et autres spécialités, les choses ne sont pas très différentes.  Le jury peut juste aller chercher plus loin dans la liste pour trouver des candidats au profil spécifique correspondant.

La réduction du nombre de postes au concours est donc logique. Mais comme il y a surplus de professeurs de physique-chimie dans beaucoup d'académies, il n'est pas rare que les titulaires du CAPES ou de l'agrégation soient envoyés enseigner des mathématiques. La chute du piédestal peut être rude.

Le mouvement normal


La situation étant bloquée pour le mouvement spécifique, il y a donc un nombre grandissant d'agrégés qui finissent au lycée, en collège ou remplaçants (TZR). Pour ceux-là, leur position face à des certifiés est alors difficile à défendre. En effet, un salaire plus élevé et moins d'heures pour le même métier, cela vous choque ? On a alors deux classes de professeurs qui s'affrontent sans rien avoir demandé. En effet, lorsque l'on a un service de 15h au lieu de 18, on peut être facilement repéré. Cette différence peut sembler d'autant plus injuste que maintenant les deux concours se passent au niveau MASTER 2.

De plus, une fois dans le système classique de mutation de postes dans le secondaire, les agrégés sont traités sur un pied de (presque) égalité avec les certifiés. En effet, pour les mutations inter-académiques, les critères de points sont identiques et sont plus basés sur l'ancienneté et la situation familiale que sur des critères « carriéristes ». La différence peut ensuite se faire avec certaines académies qui accordent quelques bonus aux agrégés pour leur attribuer des postes en lycée.

Le différentiel de points entre agrégés et certifiés peut être de quasi-nul (à Lyon par exemple) à très élevé (à Lille ou dans la région parisienne par exemple). Il faut donc faire attention à son choix de localisation pour savoir si on peut rentabiliser sa « différence ».

Il y a alors deux stratégies qui s'affrontent :
  • Aller en région parisienne (ou l'académie d'Amiens) pour avoir un poste qui est souvent intéressant (titulaire en lycée, avec des classes à concours) pour ceux qui ont peu de points (pas de rapprochement de conjoint et/ou pas d'enfant)
  •  Ceux qui peuvent rester en province au mouvement inter-académique après leur année de titularisation mais au risque de rester plusieurs années remplaçant (entre 6 et 7 ans dans l'académie de Lyon)
Quant au mythe du professeur agrégé qui n'est pas au collège, il faut être prudent, les TZR (remplaçants) n'ont pas de niveau attribué donc rien ne les empêche d'aller donner des cours au collège ou d'être rattachés à un collège.

Tout n'est donc pas rose au pays de l'agrégation. Pourtant, la différence reste..

L'agrégation : un concours plein d'avenir ?

Pour ceux qui veulent tout de même enseigner dans le supérieur, il existe une troisième voie : le statut de PRAG. En effet, un PRAG est un professeur l'université qui ne fait que de l'enseignement (384 heures annuelles). C'est donc une opportunité pour les agrégés d'enseigner dans le supérieur. Le recrutement étant sur concours, il n'y a pas de point ni d'ancienneté qui compte, mais une concurrence  directe face à d'autres agrégés. En prime, vue que la voie n'est pas très connue, peu de personnes se présentent sur les postes, ce qui permet d'avoir de bonnes chances d'être reçu. Le seul hic, il faut bien qu'il y en ait un, c'est que le salaire n'est clairement pas le même qu'en prépa (ou même en lycée). Pourquoi ? Il manque les primes qui peuvent être très intéressantes financièrement (heures de colles, primes ou heure supplémentaires annuelles). Cependant, les universités étant dans de grandes villes, rien n'empêche d'essayer d'obtenir quelques heures de colle dans la prépa d'à côté. Le statut de PRAG à l'université n'étant pas forcément bien reconnu, on peut avoir beaucoup de TD et de TP pour peu de cours. L'avancement se fait également essentiellement à l'ancienneté, déjà que les gens « dans le système » se font peu inspecter, à l'université, la carrière avance en général encore plus lentement. Ce qui fait qu'en fin de carrière, il peut y avoir une différence assez notable même avec un autre agrégé enseignant au lycée ... en défaveur du PRAG.

Cependant, les enseignements à la faculté sont plus variés, sur une carrière complète, il est plus facile de diversifier ses enseignements qu'en prépa. En effet, en prépa, les programmes bougent peu et les changements de classe ont lieu peu de fois en cours de carrière. À l'inverse, au sein des universités, il est plus facile de trouver un cours vacant. De plus, comme il n'y a pas de programme, il est plus facile d'imprimer un ton personnel sur son cours.

Pour finir, le statut de PRAG permet de directement atterrir dans une « grande » ville. À l'inverse du chemin classique des enseignants au collège lycée qui souvent commencent loin de la ville principale de l'académie et qui se rapprochent au fur et à mesure de leur ancienneté.

Au delà de l'intérêt pour les agrégés eux-mêmes, il me semble que l'état aurait tout à gagner de mettre en place plus d'agrégés à l'université : ils coûtent moins cher qu'un maître de conférence car ils ne font pas de recherche et sont enclins à pouvoir faire du travail administratif qui est extrêmement lourd pour les maîtres de conférence. À titre personnel, je pense qu'il serait préférable d'avoir 3 maîtres de conférence et 1 PRAG (pour 768 h d'enseignement) avec des maîtres de conférence à 128 h (2/3 du service actuel) et un PRAG à 384 h. Les maîtres de conférences auraient une part d'enseignement allégée, ce qui leur permettrait de mieux faire leur travail de recherche. Cela voudrait tout de même dire une "demi-part" de recherche en moins, cela pourrait être contrebalancé en redistribuant cette part recherche (en termes budgétaires) sur les 3 maîtres de conférence restants -- c'est une vision pragmatique ou utopiste vu le manque de moyens de l'université, mais bon... De plus, cela pourrait permettre d'augmenter l'efficience de l'enseignement et pourrait éviter des échecs en début d'orientation à la faculté avec des gens entièrement consacrés à l'enseignement.

De plus, la qualité des enseignements ne serait pas affectée, car les maîtres de conférence sont aujourd'hui recrutés et notés uniquement sur leur partie recherche. Tous ne s'y consacrent donc pas forcément à plein temps (ce qui ne veut pas dire qu'ils le font mal). Ceci dit, limiter les cours donnés par des agrégés à des cours de licence serait relativement juste pour laisser les points plus techniques et spécifiques à des maîtres de conférence à priori plus en pointe dans le domaine.

Conclusion

Pour élargir le champ d'action des agrégés, pour lequel aujourd'hui l'enseignement en classe préparatoire est devenu marginal, il pourrait être bon d'ouvrir les universités à ces personnes pour pouvoir d'une part alléger la charge administrative des maîtres de conférence tout en contrôlant le budget. L'existence même du concours (re?)prendrait alors tout son sens face au CAPES avec des professeurs ayant des missions plus distinctes sans forcer les plans de carrière ni empêcher des passerelles entre enseignement supérieur et secondaire.

Si vous êtes intéressés par les différents débouchés possibles après l'agrégation, vous pouvez également lire mon article intitulé "Les débouchés après l'agrégation, une petite vision des différentes options". Et si vous souhaitez passer le cap et candidater dans une préparation, vous pouvez lire mon article "Faut-il avoir fait l'ENS pour passer l'agrégation ?".


samedi 3 novembre 2012

Pourquoi Word ne devrait pas exister : ode à Latex

Les professeurs doivent de plus en plus fournir eux-même du contenu : énoncés de TP, leçons, examens. Et pour cela, il faut forcément passer par un logiciel de mise en page.

Aujourd'hui, Openoffice, Libreoffice et l'indéboulonnable Word sont donc les outils de choix pour de nombreux professeurs. Étant ardent défenseur du logiciel libre, l'utilisation des suites bureautique Office a déjà ma préférence, mais même celles-ci restent une pâle copie de ce qui est à mon sens idéal pour un professeur de sciences : Latex. Et pourtant, son utilisation reste marginale alors que Latex existe depuis les années 1980.

Les raisons sont assez simple : l'installation n'est pas intuitive : le logiciel de saisie est indépendant de Latex en lui même,  ce qui crée de la confusion. (Personnellement, je recommande texMaker qui gère l'UTF8 sous windows et Kile sous Linux pour les raccourcis qui sont personnalisables.) De plus, les débuts sont relativement ardus s'il n'y a personne pour nous guider.

Et pourtant, la distinction reste. En un coup d'œil, il est facile de distinguer un document tapé sous Latex d'un document tapé sous un éditeur « classique ».

Le principe de Latex

Le principe est relativement simple et devrait être familier à toute personne ayant déjà fait de l'HTML. Sous latex, plutôt que cliquer quelque part pour dire qu'on veut centrer, on l'écrit. Comme un navigateur internet, c'est lors d'une étape de « compilation » que Latex va lire le contenu, différencier le texte qui doit apparaître des commandes pour centrer, mettre en italique, etc.. Il va donc suivre les instructions écrites pour créer un document.

Word est un éditeur de type "WYSIWYG "(what you see is what you get, ce que vous faites est ce que vous voyez) alors que Latex est un éditeur "WYSIWYM" (What you see is what you mean, ce que vous avez est ce que vous voulez dire).

C'est la différence principale entre les deux systèmes et c'est tout ce qui fait la différence.

Pourquoi Latex, ça rebute ?

Dans Latex, les gens qui commencent tapent un peu de texte, compilent, et là, c'est le choc. En effet, de base, Latex n'accepte pas les accents et les marges sont énormes pour quelqu'un habitué à Word. Ça commence très mal. Et c'est là que commence la course aux package et aux options.

Latex marche par package, plutôt que d'avoir toutes les fonctionnalités possibles de Latex chargées. Les fonctionnalités de bases sont limitées et progressivement, les packages permettent de rajouter des fonctionnalités et des commandes disponibles. Et là, heureusement qu'internet est là, en général, si vous tapez votre question, vous pouvez trouver une réponse qui vous donne le package à charger et les commandes qui vont avec.

Ce fonctionnement est bizarre, mais ça permet en général de faire en sorte qu'un document soit tout le temps le même, aussi bien sous Linux, Windows ou autre, que notre ordi soit récent ou vieux. Un fichier tex donnera à priori tout le temps le même document, même dans 30 ou 40 ans, car le système est extrêmement robuste, en effet, il date de 1991 !! Or si vous essayez de réouvrir un document Word vieux de 20 ans, vous risquez d'avoir des problèmes. De plus, ce fonctionnement permet d'avoir beaucoup plus de ressources sur internet car les packages évoluent peu et du coup, les réponses sur les forums restent en général valables pendant de nombreuses années alors que certaines fonctionnalités sont régulièrement chamboulées sous Open Office ou Word.

Par contre ça veut dire qu'il faut petit à petit trouver les packages qui vous intéressent et éventuellement les télécharger. Sous Linux, pour éviter de me poser des questions, j'ai téléchargé quasiment tous les packages existant. C'est votre connaissance de ces packages qui va faire de vous un « gourou » ou un simple utilisateur. Et les packages, c'est un peu comme les applications Iphone : il y a en pour tout : mettre des en-tête, intégrer des images, avoir un texte sur plusieurs colonnes, faire un poster, un examen, dessiner des objets, des molécules, des circuits électriques et j'en passe.

La taille des fichiers

Pour des professeurs qui travaillent ensemble, c'est plutôt agréable. Car à présent, les gens qui utilisent des docx ou autre cochonneries posent souvent des problèmes à leurs collègues qui n'ont pas la version dernier cri et qui n'est pas compatible avec la leur.

Le document tex étant de plus un simple fichier texte avec une extension, c'est en général extrêmement léger : un cours de 90 pages sans les images fait 300Ko et environ 20Mo tout compris (images+fichiers dérivés). Le document final fait 7Mo alors qu'il y a plein d'images.

Les images

La gestion des images n'est également pas très intuitive pour le quidam, mais au final assez pratique. Pour gagner de la place, Latex ne stocke pas les images directement dans le .tex. Il va les chercher sur votre disque dur à l'endroit indiqué. Donc si vous avez fait une erreur, il suffit de corriger directement l'image d'origine, elle sera automatiquement mise à jour dans le fichier final. Pas besoin de la réimporter en la copiant. Et Latex accepte directement d'intégrer des images au format vectoriel, ce qui permet d'avoir des images d'excellente qualité, aussi bien à l'écran qu'à l'impression.

Un conseil, utilisez pdfLatex pour compiler votre document, comme ça vous avez directement un pdf et les formats d'image que vous pouvez utiliser sont beaucoup plus nombreux : pdf, png, jpg (ça suffit).

De même, vous pouvez directement appliquer des transformations simples : homothétie, rotation. En général vous ne voyez pas en direct ce que vous faites. Il faut donc tâtonner pour avoir ce que vous voulez. Un peu d'expérience permet de prendre progressivement le coup de main.

Les commandes prédéfinies

C'est là la force extraordinaire de Latex : vous pouvez définir vous même des commandes pour faire certaines actions répétitives, par exemple, pour taper une dérivée, normalement, il faut dire que vous avez une fraction, taper la lettre "d" en roman pour indiquer que vous faites une dérivée en haut et en bas pour finalement mettre ce que vous dérivez par rapport à quoi.
Ce qui donne par exemple : $\dfrac{\mathrm{d}\,f}{\mathrm{d}\,x}$ pour dire que vous dérivez f par rapport à x. C'est plutôt lourd et pénible à taper, mais vous pouvez définir une commande pour automatiser le processus : en rajoutant cette ligne : \newcommand{\derd}[2] {\dfrac{\ch{d}\, #1}{\ch{d}\, #2}} vous n'avez ensuite plus qu'à taper $\derd{f}{x}$ pour exactement le même résultat, Word le fait avec des macros, mais le champs des possibilités est plus réduit et le nombre de personnes qui s'en servent est faible : à titre personnel, je n'ai encore vu personne qui s'en serve concrètement.
De plus, le fonctionnement sous Word n'est pas plus simple (ni plus compliqué). Vous pouvez ainsi rendre quasi automatique des séquences de texte qui correspondrait à plusieurs clics sous word avec un acronyme de votre choix. Pour un professeur de sciences, c'est inestimable de ne pas avoir à taper complètement la symbolique associée à une enthalpie de réaction mais un simple \drh par exemple. Vous pouvez ainsi être beaucoup plus constant sur un document, vous savez que tout sera correctement tapé avec un minimum d'effort. Les règles de typographie recommandées par l'IUPAC et l'IUPAP pour la rédaction  de documents scientifiques ne sont plus un calvaire mais  deviennent un outil intéressant.

Uniformité, mise en page

 De base, Latex contrôle énormément de détails de la mise en page, et ça ne correspond pas forcément à ce que vous voulez. Il faut ainsi parfois redéfinir certaines mise en page automatique. Ce n'est pas toujours très intuitif, même si des packages comme titlesec facilitent le processus. Et pourtant, le nombre limité de photocopies impose souvent de devoir avoir une mise en page très compacte.

Au final, une fois que vous avez trouvé comment faire, encore une fois, vous n'aurez plus à le refaire, il suffira de recopier la commande qui fait ce que vous voulez, ou encore mieux, mettre ces commandes dans un fichier commun pour tous vos documents et ensuite l'inclure dans votre fichier tex. J'ai ainsi pu mettre des titres en bleu cyan et des sous titres en rose souligné pour quelqu'un qui souhaitait cette mise en page pour s'y retrouver facilement dans son plan de cours. C'est comme les feuilles de styles CSS en HTML : à un endroit vous définissez le comportement et la mise en page, ensuite vous pouvez être concentré sur votre document et ne pas avoir à faire 50 000 clics pour vos formules, avoir un texte uniforme, etc. Il y a une vraie séparation entre le moment de la rédaction et le moment de la mise en page.

Conclusion

Latex, bien que rebutant pour les néophytes mérite vraiment d'être utilisé. En effet, avant de commencer, il faut passer une bonne demi-journée ou journée pour comprendre comment ça marche, mais une fois que l'on a compris les principes. Il devient alors possible de créer des documents très complexes ou correctement typographiés sans aucune difficulté. Le mieux est d'avoir quelqu'un qui connaît déjà un peu le système et qui puisse vous montrer tout ça. Pour les tâches complexes, vous pourrez trouver de l'aide sur internet. La solution a l'avantage d'être tout le temps la même (pas d'icônes déplacées selon les versions ou d'option inexistante). On peut ainsi créer des livres de plusieurs centaines de pages (400 pages, 29Mo) sans aucun problème en fractionnant les chapitres, avec une mise en page uniforme, respectant les standards typographiques, avec des espaces suffisants et un texte très lisible. De même, toutes mes correction du CAPES et de l'agrégation sont tapées sous Latex. Vous pouvez ainsi juger de la qualité d'un document complexe produit sous Latex.

Au passage, j'ai créé un cours complet de 130 pages avec une série d'exercices. Vous pouvez y jeter un coup d'oeil. 

P.S. Même en lettres, Latex arrive à attirer pour la structuration du contenu et son rendu : LaTeX appliqué aux sciences humaines.